« Le silence va plus vite à reculons, trois fois, le silence va plus vite à reculons, trois fois. Je répète : le silence va plus vite à reculons, trois fois. »
(Jean Cocteau, Orphée).
Parce que depuis plusieurs jours fourmille en moi des émotions variées, des évidences dans la façon de danser avec les choses de la vie, de tous les aspects de la vie, de tous les endroits créatifs de cette vie.
Et puis, lorsque je me décide enfin à ouvrir le carnet, je ne trouve rien d’autre à y coucher qu’un profond silence et comme le silence ne se dit pas, rien n’arrive, rien ne nait – et je me dis finalement que c’est peut-être très bien ainsi.
Mais je me trompe certainement, car ici, ce n’est pas le silence qui émerge mais plutôt le vide des mots ; le silence n’est pas tant l’impossibilité de l’expression des sons qu’un endroit plein d’un vide volontaire, choisi et décidé.
Et je comprends qu’en moi se jouent des tas de motifs qui s’entrechoquent de façons incontrôlées, depuis l’envie du laisser agir - mais justement n’y a t’il pas là besoin de supprimer l’envie si on veut laisser agir ? - jusqu’au désir de déployer des stratégies sensées mettre des événements en action.
Alors le vide ronge le silence ; le vide c’est le rien qui nous bouscule, c’est ce qui ne vient pas dans l’absence.
Le silence, lui, est un acte conscient. Si dans le brouhaha incessant des jours je décide vraiment de faire le silence, avec une forte détermination, j’y parviens sans peine. Le paradoxe réside dans le fait qu’il faille être déterminé à lâcher prise avec les pensées parasites, les sons non choisis, je veux dire les bruits du monde.
Il faut renoncer mais renoncer c’est encore agir.
Alors, je me résous à renoncer tandis que le silence s’invite soudainement et naturellement dans un mouvement d’air que j’inspire.
Et dans ce silence improbable je dépose enfin les mots nouveaux de sensations encore et toujours éphémères.
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